LA FABRICATION D’UN CANON

La période hivernale pointant le bout de son nez, les activités et divers compétitions vont se faire plus rares. Aussi je vous propose certains articles, qui, pour ceux que cela intéresse, vous permettront d’apprendre de nouvelles choses et/ou de tordre le coup à certaines croyances. N’hésitez à venir vers moi ou un membre du comté directeur si vous souhaitez voir aborder certaines questions techniques .

Commençons donc par le début, la fabrication du canon. (7 Février 2020 , Rédigé par Ballistic Shooters.)

Dans cet article, Ballistic Shooters va vous présenter les différentes façons de fabriquer un canon. Nous évoquerons également les avantages et inconvénients des méthodes courantes.

Si la nécessité de rayures n’est plus à démontrer et que la méthode de calcul du TWIST est connue , le nombre de rayures reste quant à lui une interrogation. Cependant, les méthodes de fabrication sont belles et bien connues.

Avant de commencer, permettez-nous ces quelques lignes :

« Un canon de précision est comme une épée forgée à l’époque des guerriers. Dans une armurerie, une bonne épée ressemblera à beaucoup d’autres épées. De même qu’une épée d’ornement, très jolie certes, peut être trompeuse. C’est seulement lorsque le guerrier commencera à utiliser son épée qu’il saura si c’est une bonne ou très bonne épée. Enfin, même si un jeune guerrier peut apprécier les qualités d’une très grande épée, seul le connaisseur confirmé sait déduire, de l’agilité, du tranchant et de l’équilibre, le fin travail du forgeron qui a forgée cette épée et de son servant qui a maintenu la bonne température du four. Il en est de même pour les canons de précision ».

Séchons nos larmes et… revenons à nos moutons.

La fabrication des rayures s’appelle « le rayage ». La méthode impactera directement sur la précision et la résistance du canon. En effet, la manière de procéder peut « stresser » plus ou moins le métal. Le traitement à l’issue du rayage est primordial également. Tout ceci dans un but unique = Respecter au mieux le métal afin d’en exploiter au mieux ces capacités et, si possible, le plus longtemps possible. Contrairement aux idées reçues, ce n’est pas les passages successifs des balles dans le canon qui l’usent. Tout du moins, pas directement. En effet, la formation de nitrures par les gaz se déposent dans le canon formant des petites irrégularités. Très dur mais aussi très fragiles, ces nitrures aux passages des balles viennent user le tube. On comprend donc que sans ces dernières il n’y aura pas ou très peu d’usure. Le choix du métal et la manière dont il est usiné conditionne la résistance à cet effet abrasif. Les aciers utilisés pour les canons sont l’acier Inoxydable #416 ou l’acier Chromoly (Chrome/Molybdène). Le premier plutôt utilisé pour les canons de précision et le second pour les canons militaires ou de chasse.

Les méthodes de rayage sont les suivantes :

  • Rayage à l’outil (Single Point Cut Rifling). 
  • Rayage par olivage (Button Rifling).
  • Rayage par martelage à froid (Hammer Forged Rifling)
  • Rayage par brochage (Broach Rifling)
  • Rayage par écoulement (Flow Forming)
  • Rayage par électro-érosion électrique (Electric Discharge Machining)
  • Rayage par électro-érosion chimique (Electro Chemical Machining)

Après avoir découpé un tube à la longueur nécessaire au rayage (ne correspondant pas à la longueur finale réelle), il est foré de part en part. L‘extérieur du tube sera, ou non, façonné avant le rayage en fonction de la méthode choisie. Il s’agit à ce stade d’un tube de métal troué de part en part. Il convient désormais d’y imprégner les rayures.

Le rayage à l’outil (Single point Cut Rifling).

Egalement appelée méthode traditionnelle, celle-ci remontrait en 1492 à Nuremberg. C’est la méthode la plus longue mais la moins contraignante pour l’acier. Elle consiste à faire passer à l’intérieur du tube un outils: coupe-crochet. 

L’outil retire quelques dixièmes de millimètre à chaque passage. Rayure par rayure. En parallèle, on fait tourner le tube, ou l’outil sur lui-même, afin d’imprimer le twist désiré. Si le tube nécessite 8 rayures, l outils doit effectuer 8 passages. A l’issu, l’outil est ressorti de quelques centimètre et est réglé pour le passage suivant. 

Cette opération est réalisée jusqu’à obtention du diamètre voulu en fond de rayure. Aujourd’hui, il s’agit de machine à commande numérique automatisées. De l’huile de coupe est également injectée afin de faciliter les passages. Cette méthode peut prendre une heure (voir plus) en fonction de la profondeur désirée, du TWIST et de la longueur du tube, ce qui est très long au vues des technologies actuelles. 

Aucune contrainte n’est imprégnée au métal. Cette méthode permet d’obtenir d’excellents canons de précision qui devront impérativement être rodés afin de retirer toutes aspérités dû au rayage. La tolérance et la précision sont accrues et le « custom » est possible. Comme la procédure est plus longue que les autres méthodes, un canon réalisé par « Cut Rifling » coûtera plus cher. Cette méthode est bien sûr peu adaptée à la production de masse et est réservée au canon de précision.

La lenteur de ce procédé a conduit à beaucoup de recherche, durant la dernière guerre notamment, afin d’augmenter la production de masse. Les méthodes qui suivent en découlent directement.

Le rayage par olivage (Button Rifling).

Méthode extrêmement rapide, elle consiste à passer un mandrin en carbure de tungstène avec pour relief le profil des rayures. Un seul passage est nécessaire et il suffit d’une minute en moyenne pour imprégner les rayures dans le tube. Les mandrins sont résistants et plutôt « bon marché » et les machines relativement simple à concevoir. 

Le TWIST sera en fonction de l’inclinaison des rayures positives sur le mandrin. Une très bonne lubrification est primordiale. En effet, tout glissement de l’olive sur son axe lors de son passage dans le tube entraînera un décalage du pas de rayure. Cela peut représenter 5 à 10% de glissement. Pour faire simple, un tube de 1/12 peut glisser à 1/13 par endroit et impacter directement la précision du canon. Un tel décalage n’est bien sûr pas visible à l’œil nu et peut même passer à travers les contrôles qualité. Un problème de concentricité de diamètre d’alésage en fond de rayure peut également apparaître. Ceci aura comme impact la précision du tir à courte distance. C’est l’une des raisons pour lesquelles le nombre de rayures peut être augmenté. Toutes ces risques sont uniquement liés au contraintes imposées au métal lors du passage du mandrin. Tout est une histoire de continuité dimensionnelle du tube et de ses rayures, et d’un minimum de formation d’imperfection (invisible à l’œil). La qualité du métal est un élément majeur pour ce genre de fabrication afin, encore une fois, d’obtenir la meilleure homogénéité dimensionnelle. Si ce choix est bon et que le travail est bien réalisé, le résultat sera excellent et les canons précis. Dans cette méthode de fabrication, le métal doit-être re stabilisé avant de le profiler. Sans traitement, la libération des tensions du métal entraînera une augmentation de l’alésage. Ces contraintes sont inexistantes dans la méthode traditionnelle qui respecte et stresse au minimum le métal.

Le rayage par martelage à froi(Hammer Forged Rifling).

Pour être juste, nous devrions plutôt l’appeler « empreinte à froid ». En effet, cette méthode ne consiste pas à rayer au sens propre l’acier pour créer les rayures, mais plutôt à les imprégner à l’aide de gros « marteaux » de frappe. Le tube est découpé en deçà de sa longueur totale finie puis percé de part en part. On insert ensuite une forme (moule positif) en tungstène. 

Cette forme peut même contenir la chambre. Puis, 4 à 6 marteaux viennent frapper sur le métal qui, en se déformant, s’allonge le long de la forme en s’empreignant des rayures.

Les contraintes pour le métal sont énormes et là encore, un traitement adapté et très rigoureux doit-être respecté à l’issue. Le profil extérieur peut également être réalisé à ce stade. Deux minutes environ suffisent à la réalisation de cette opération. La forme coûte très chère. La flexibilité n’est pas permise avec ce type de méthode. L’uniformité dimensionnelle est respectée. Il existe beaucoup plus de canon dit « de précision » martelés à froid que l’on ne pense et de grandes marques utilisent ce procédé.

Rayage par brochage (Broach Rifling).

C’est également une méthode de rayage rapide. En effet, l’outil appelé une broche est constitué d’ un ensemble de dents d’ébauche qui font les premières ébauches, suivi d’un ensemble de dents semi-finissantes qui font des coupes plus fines, suivi d’un ensemble de dents de finition très fines qui laissent une très bonne finition. 

L’outil est tiré à travers le canon tout en ayant une rotation, toutes les rayures sont faites en même temps. La clé de la réussite de cette technique est la qualité et précision de la broche car l’outil est unique et fait le travail en une seule passe. De plus, la broche n’est utilisable que pour un seul type de canon, chaque changement de diamètre, nombre ou type de rayure ou autres entraîne un changement de broche. Les contraintes pour le métal sont sensiblement les mêmes que pour pour le rayage à l’outil.

Rayage par écoulement (Flow Forming).

La méthode consiste un peu comme celle du martelage a placer un tube d’un diamètre supérieur au produit final sur une matrice (négatif des rayures) sauf qu’on ne va pas  frapper avec des marteau pilons. L’opération se passe sur une sorte de tour CNC, le tube et la matrice tourne alors que des rouleaux exercent une pression pour modeler le métal à la forme de la matrice. 

Le canon est généralement formé en plusieurs passes. Même si le processus se déroule à froid, le principe fait chauffer les pièces et doivent être refroidi avec un liquide. Cette méthode permet d’avoir un fini de très haute qualité et une précision dimensionnelle très élevée. Cette technique semble gagner en popularité.

Rayage par électro-érosion électrique (Electric Discharge Machining) et Rayage par électro-érosion chimique (Electro Chemical Machining).

La méthode de rayage par électro-érosion électrique consiste à retirer les couches de métal au moyen d’arcs électriques. On connecte le canon à une source électrique et une électrode également connectée à une source électrique est approchée de l’endroit à usiner. Cela se déroule avec les 2 pièces immergées dans un liquide diélectrique. Lorsque l’électrode approche le canon, un arc électrique est généré et fait fondre et vaporise de minuscules parties de métal.Bien évidemment tout ceci est réalisé sur des machines CNC. 

Cette technique permet d’usiner des matériaux très durs qui sont difficiles à usiner par d’autres méthodes. C’est très précis et très peu de contraintes sont appliquées au canon et il n’y a pas besoin d’ébavurer le canon.Cependant cette technique est très coûteuse et est réservée au haut de gamme.

Moins coûteuse et plus adaptée à la production de masse, la méthode de rayage par électro-érosion chimique consiste en un processus de plaquage de métal inversé. on utilise une électrode en plastique sur laquelle on fixe des bandes métallique. Les bandes métalliques sont une image inversée des rayure. Seul le plastique peut toucher le canon, ensuite le tout est plongé dans une solution électrolytique. L’électricité crée une réaction chimique entre les parties métalliques. On déplace et tourne l’électrode suivant les rayures voulues. 

Cette technique est également très précise et permet d’usiner des matériaux très durs comme le titane, cependant ces machines coûtent cher et consomme énormément d’électricité.

Vous l’aurez compris, la fabrication d’un canon induit directement sur sa précision. Le maintien de la continuité dimensionnelle interne est capital afin d’éviter des irrégularités. Le respect du métal contribue à la longévité de votre tube. Il existe en plus l’aspect dit « de rodage ». Beaucoup d’encre a coulé sur cette partie et les spécialistes ont du mal à s’accorder réellement. En l’absence de traitement spécial, le tube fabriqué avec la méthode traditionnelle doit être rodé. Cela permet le retrait des aspérités générées lors du passage de l’outil. Dans l’idéal, il doit être réalisé à la main avec un mandrin de plomb associé à une pâte abrasive aux grains extrêmement fins pour lisser et polir le tube. 

Ajoutez à cela un rodage au tir en respectant telle ou telle procédure. Nous ne nous risquerons pas à détailler ici une méthode de rodage. Nous ne prendrons pas non plus part dans la nécessité ou non de le faire. Une chose est certaine, le respect du métal est la clé de voûte d’un canon de précision et il peut mettre un certain temps pour arriver à maturité. Songez-y et, tirez en vos propres conclusions.


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